Principes d’intervention

Principe d'agora

Dans notre jargon, l'agora est la réunion de toutes les personnes ayant des savoirs ou du pouvoir sur la situation à travailler. Ce rassemblement est une condition du partage des informations en direct, chaque personne reçoit les mêmes informations, de première main.

Principes de non-savoir et d'implication

Nous menons un travail permanent de détachement de nos représentations, de vigilance à rester fidèles aux analyses produites par les participants eux-mêmes, c'est ce que nous appelons le non-savoir. Tenir ce principe nous garde de trop peser sur l'analyse des situations que nous ne vivons pas. Notre expertise se situe dans la conduite du processus de production de l'analyse par l'assemblée.

Principe clinique

Il est fréquent de recevoir une première demande confuse ou approximative. La commande est un point d'entrée, nous considérons que le cahier des charges est dynamique. L'ordre du jour et les raisons de notre présence sont enrichies, complexifiées, précisées au cours même de l'intervention. Tenir le principe clinique, c’est privilégier en permanence le vécu sur le prévu, ne pas s’imposer, ni imposer, un programme a priori ni un ordre d’un jour, si pertinents soient-ils à nos yeux.

Principe de multi-partialité

Nous assurons l'expression et la compréhension de tous les points de vue, dans une vision dialectique, éloignée de toute morale. Nous ne défendrons pas une position plutôt qu'une autre, parmi ce qui est énoncé par l'assemblée, qu'il s'agisse de diagnostics ou de propositions.

Principe de dérangement

Une organisation s'arrange continuellement avec le réel pour poursuivre son œuvre. Ces arrangements lui permettent de continuer à exister, jusqu’à un certain point. Ils peuvent aussi scléroser petit à petit l’organisation et lui font perdre son sens. Interroger ces arrangements, pour transformer l’organisation, c’est donc produire du dérangement.

ANALYSE INSTITUTIONNELLE

l’institution comme mouvement

Pour l'analyse institutionnelle, une institution est une forme sociale animée de forces sociales ; donc un groupe d'amis, un habitat groupé, un réseau informel, une famille sont aussi des institutions. Cette forme sociale est la résultante du mouvement des forces qui la composent dès sa création. Ces forces, ce sont les opportunités, les menaces, les innovations, les traditions, les personnes, les clans, les normes, les lois... 
Au fil du temps, les forces sociales vont évoluer et vont agir sur la forme sociale. Mener une analyse institutionnelle, c'est observer ce jeu entre forces sociales et forme sociale. C'est pour cette raison qu'une institution est vue comme une forme en mouvement et n'est pas confondue avec un établissement. Une institution entre en crise lorsque les forces qui la composent se cristallisent, figeant aussi ses formes sociales.

“ Pratiquer l’analyse institutionnelle, c’est mettre à jour les dynamiques de fonctionnement d’une institution.”

La socianalyse (et non la socio-analyse, qui vient de la sociologie) est la pratique d’intervention ayant engendrée l’analyse institutionnelle. Pratiquer l’analyse institutionnelle, c’est mettre à jour les dynamiques de fonctionnement d’une institution.
Fondée dans les années 1970 par René Lourau et Georges Lapassade, l’analyse institutionnelle permet d’adapter les formes d’une organisation aux forces qui la composent. Ce travail d’enquête et de recherche, menée par l’assemblée des personnes concernées, produit une transformation concrète de cette organisation. L'analyse institutionnelle est un courant scientifique basé sur une méthode de recherche-action : la recherche au service de l’action, dans une perspective démocratique, avec les acteurs sociaux concernés.

RECHERCHE-ACTION

de la quête à l’enquête

Il existe une infinité de définitions de la recherche-action. Nous l'envisageons comme la production de connaissances issue de l'expérience concrète (un savoir d'usage), c'est-à-dire par les personnes vivant directement l'organisation, pour se risquer à tirer des conséquences de ces enseignements sur l'action elle-même, et par là, opérer des choix de manière plus déterminée et donc à transformer l'organisation, pour en faire l'expérience et à nouveau à l'analyser et produire des savoirs de cette nouvelle situation. La pensée est envisagée dans une dynamique, dans son mouvement. 

“ Ne pas se contenter d’appliquer des connaissances découvertes ailleurs, ou de plaquer des outils élaborés ex-nihilo, ne pas répéter des recettes qui ont fonctionné dans d'autres circonstances.”

Grâce à la réflexion personnelle qu’elle produit et à son dynamisme, elle aide à sortir d’une posture statique qui consiste à réitérer une même stratégie sans parvenir à améliorer les résultats d’apprentissage et acquérir une meilleure efficience dans l'action. Elle permet également une meilleure prise de conscience de l’impact des interventions. Ne pas se contenter d’appliquer des connaissances découvertes ailleurs, ou de plaquer des outils élaborés ex-nihilo, ne pas répéter des recettes qui ont fonctionné dans d'autres circonstances. Cela ne signifie pas "repartir à zéro", la connaissance en situation de ce qui fonctionne, a fonctionné, ou pas, peut être une porte d'entrée pour l'analyse de situations. 

Elle est avant tout action parce qu'elle a pour ambition la transformation concrète, la mutation pragmatique de situations qui sont jugées par les acteurs comme incompréhensibles, difficiles, contraignantes, conflictuelles, fatigantes, non-porteuses de sens, inconfortables, insatisfaisantes. La recherche-action n'a pas pour postulat de se borner à chercher des solutions à des problèmes : c'est l'analyse collective de la situation qui imposera la solution. L'objectif n'est donc pas de chercher une solution à tout prix mais bien de regarder la situation avec une multiplicité d'angles pour mieux appréhender son inhérente complexité, la comprendre et donc mieux l'affronter.